Personnage de fiction : 9 clés [+ fiche personnage en 210 questions]

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Une bonne histoire repose avant tout sur un personnage fort. C’est pour cela que je vous ai préparé une fiche personnage à ma manière.

Quand je dis fort, je veux dire suffisamment fouillé, pas qu’il doit pouvoir soulever des poids ou tirer des locomotives avec ses dents. Soyons bien clairs là-dessus.

Attention, cet article s’adresse à vous surtout si vous débutez dans l’écriture, si vous avez un autre métier à côté, si vous n’êtes pas à 100% occupé à faire vivre vos personnages.

Utilisez une fiche si vous revenez régulièrement à votre récit mais que la majeure partie de votre vie professionnelle est ailleurs. Dans le cas où c’est votre activité principale, vous n’avez vraisemblablement pas besoin d’une fiche personnage, car vous êtes totalement investi et vous avez vécu assez longtemps avec vos personnages pour les connaître sur le bout des doigts. De plus, vous n’oubliez rien entre deux sessions d’écriture.

Ainsi, de nombreux écrivains professionnels n’utilisent pas de fiche personnage, n’en ayant pas besoin. Mais pas tous. A vous de décider. Comme toujours, l’art, c’est la liberté. Il vous appartient d’en user.

En revanche, si pour vous l’écriture est une activité parmi d’autres, je vous encourage à essayer la fiche personnage, à condition de la mettre à jour au fur et à mesure car l’imagination est ainsi faite que vous partirez avec une idée en tête mais qu’en cours de route, tant de nouvelles possibilités se présenteront que ce serait bien le diable qu’il n’y ait pas quelques évolutions.

Construire des personnages denses

Pour que votre personnage intéresse le lecteur, vous devez lui attribuer des caractéristiques, des aptitudes naturelles, des compétences acquises, un passé, un milieu où évoluer, des goûts et des dégoûts, des rêves, des croyances, des limitations... tout ce qui lui donnera épaisseur et profondeur et vous permettra de lui prêter des émotions, des actions et des réactions.

Le lecteur doit pouvoir s’identifier à votre héros. Pour cela, vous devez construire sa personnalité soigneusement.

Vos personnages sont les pierres sur lesquelles bâtir votre roman.

Bâtir un personnage humain

Si votre héros (ou votre héroïne) n’est pas assez dense, assez crédible, si il ou elle ne souffre pas de contradictions ni de faiblesses, il ou elle sera profondément ennuyeux.

Attention, crédibilité ne veut pas dire prévisibilité.

Tout ce que nous faisons est motivé par notre façon d’envisager le monde, et notre façon d’envisager le monde est déterminée par qui nous sommes, d’où nous venons et ce que nous avons reçu ou perçu durant notre vie, surtout durant notre enfance.

Et surtout, surtout, de la façon dont nous l’avons interprété. C’est notre interprétation des événements qui crée une trame temporelle continue à laquelle nous référer. C’est là-dessus que vous pouvez appuyer à loisir pour donner vie à votre personnage. Comment a-t-il intégré ce qu’il a reçu ? A-t-il beaucoup de libre arbitre ou le croit-il ? Est-il résilient ?

Ce processus est la source de nos contradictions aussi bien que de nos addictions, de nos croyances aussi bien que de nos espérances.

Attention, imprévisibilité ne signifie pas incohérence.

Vous pouvez conférer une certaine part d’imprévisibilité à votre héros, mais cela doit rester cohérent avec ce que le lecteur peut déceler de lui dans votre prose.

Votre personnage peut sembler incohérent à qui ignore ses motivations profondes, y compris au lecteur, jusqu’à temps que vous les lui révéliez. Il est possible aussi que votre héros lui-même agisse en toute inconscience de sa motivation profonde et de toute bonne foi. Surtout si il ou elle est jeune.

Nos motivations qui sont parfois si profondes qu’on est incapable de se les avouer à soi-même ou qu’une part de nous refuse de les voir, et avec lesquelles il faut se coltiner toute sa vie durant.

Mais ce qu’on ne s’avoue pas à soi-même peut parfois transparaître aux yeux des autres et peut être utilisé pour ou contre nous par qui sait en jouer. Un antagoniste, par exemple.

Il est primordial de conférer un peu de matière organique à vos personnages en explorant leurs contradictions et leurs motivations profondes, avant de vous embarquer dans votre roman.

Autrement dit, pour devenir romancier, il vous appartient tout d’abord de devenir fin connaisseur de l’âme humaine.

🗝️ Clé n°1 [+fiche personnage] : Comment évoquer les traits physiques

Votre physique n’est pas ce qu’il y a de plus intéressant ni de plus important en vous-même, on est bien d’accord. Votre aspect extérieur est loin de vous représenter dans toute votre intégrité.

Mais c’est la première chose que voient les gens que vous rencontrez et surtout, ce que vous mettez en scène chaque jour pour les autres, de façon plus ou moins consciente. Ce que les inconnus voient de vous détermine leurs actions et leurs réactions. Votre « aspect » n’est donc pas anodin.

Partant du principe que vos personnages sont comme vous et répondent à la même logique, vous devez leur donner des traits, une physionomie, une stature, un langage corporel, des intonations, etc.

Extraire et ne dire que l’essentiel 

Je vous conseille de vous inspirer de quelqu’un que vous connaissez. Un ami, un collègue, un voisin, une personne publique feront l’affaire.

Par exemple, Benny Orselo, un de mes personnages de Toute la lumière, a pour moi le physique d’un de mes amis, excepté la stature. En revanche, il n’en présente pas du tout le caractère.

Cet ami ne se reconnaîtra pas. C’est normal, ce n’est pas lui que j’évoque. Mais moi, je sais exactement à quoi ressemble le visage de Benny lorsqu’il dit telle ou telle chose, ressent telle ou telle émotion. Cela m’aide beaucoup dans les scènes où il est confronté à un autre personnage.

Une fois que vous avez mis un visage sur votre personnage, extrayez-un un ou deux caractères saillants, ainsi qu’une impression d’ensemble. Attention, méfiez-vous des descriptions, rien de plus rasoir que l’exhaustivité.

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Choisissez avec soin les mots pour le décrire. Dans l’idéal, la description physique doit faire deviner quelque chose de la psychologie du personnage.

Ou de la psychologie du narrateur et de ses sentiments envers le personnage si ce n’est pas la même personne.

Attention, n’oubliez jamais que le lecteur a ses propres repères.

Si vous lui décrivez un vieil homme grand et voûté avec un profil d’aigle, il ira immédiatement chercher dans sa banque de données, dans ses images mentales, dans ses souvenirs quelqu’un qui correspond à ça.

Et le trouvera.

De la cohérence et de la permanence

Soyez sûr(e) de vous, ne vous emmêlez pas les pinglots. Ne décrivez pas un personnage chétif au chapitre un pour en faire un champion de karaté dans quelques pages.

Le mieux est encore de tout noter, car on ne sait jamais combien de temps va durer un projet d’écriture ni combien de fois on le reprendra après l’avoir laissé reposer.

Ma fiche personnage en 210 questions devrait vous permettre de donner vie à vos héros. Vous pourrez la consulter à tout moment pour ne pas faire d’erreur. Téléchargez-là en remplissant le bandeau bleu en haut de page, et renseignez-là.

Vous l’aurez sous la main en permanence, et même si vous arrêtez d’écrire pour une raison ou une autre et reprenez plus tard, rien de plus facile que de vous y référer.

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🗝️ Clé n°2 [+fiche personnage] : Tout savoir de lui ou d’elle

Une fois que vous savez de quoi il ou elle a l’air, il vous reste encore à apprendre de quoi il ou elle est capable, à quel point il est doué dans certains domaines et mauvais dans d’autres, ce qui le passionne, l’indiffère ou le révulse, quelles sont ses relations avec sa famille (s’il en a une), avec l’argent, le sexe, s’il croit en Dieu, s’il a des amis, quel est son but dans la vie et ce qui pourrait l’en détourner, pourquoi, etc.

Tout, vous devez absolument tout savoir. Ce qui ne signifie pas que vous deviez tout dire.

Pour que votre personnage ait un peu d’épaisseur, qu’il ne soit pas seulement une marionnette que vous agitez au bout d’un bâton, vous devez connaître ses traumatismes, ses regrets, ses secrets, les actes qu’il a commis dont il n’a jamais parlé à personne, comment il voudrait qu’on le voie et comment il est effectivement vu… tout ça tout ça.

N’en faites pas un monolithe, au contraire, n’ayez pas peur des contradictions, aucun de nous n’est fait d’un bloc.

Attention, selon son âge, son origine sociale et géographique, le contexte dans lequel il vit, enfin bref, son histoire personnelle, il aura des préoccupations différentes, un langage différent, différentes façons de réagir.

Cas particulier : Les feuilles persos des jeux de rôle

Une façon de faire très intéressante consiste à tirer au sort les caractéristiques physiques du personnage ainsi que ses aptitudes, en s’inspirant des jeux de rôles.

J’ai utilisé quant à moi, pour écrire des contes, les feuilles personnage du jeu “Rêve de dragon”. En suivant la masterclasse de Bernard Werber, j’ai eu la surprise de l’entendre dire qu’il lui arrivait aussi de recourir à cette méthode. C’est qu’elle n’est pas mauvaise.

Toutefois, telle quelle, la feuille perso de « Rêve de dragon » est peut-être plus adaptée aux auteurs de fantasy, de SF ou d’action qu’aux romances ou au roman contemporain.

Selon le genre dans lequel vous écrivez, il est toujours possible de la bricoler à votre sauce, de changer la compétence « crocheter les serrures » en « champion de mots croisés », le principe reste valable.

L’intéressant là-dedans, c’est le tirage au sort, qui permet de sortir un peu de votre pré carré, en vous proposant un personnage que vous n’auriez pas créé spontanément. Votre travail d’écriture n’en sera que plus passionnant.

🗝️ Clé n°3 [+fiche personnage] : Un nom qui lui va comme un gant

Vous devez aussi choisir le nom de votre personnage, je ne vous apprends rien.

J’ai déjà abondamment parlé de cet aspect, tout d’abord dans cet article (A la poursuite de Bardamu ou comment nommer vos personnages de fiction) , puis dans celui-ci (Lire Olivier Rogez avec la langue des oiseaux ), car je vous fais un aveu, je suis fascinée par les noms de famille et ce qu’ils véhiculent. Parfois, un personnage viendra à vous déjà baptisé. Son nom s’imposera de lui-même.

Mais d’autres fois, vous commencerez à écrire en sachant que vous n’avez pas trouvé le bon prénom, le bon patronyme. Ne vous en faites pas, un jour, vous saurez.

Si vous faites partie des écrivains qui ne peuvent pas écrire sur un personnage dont ils ne connaissent pas le nom (il y en a), je vous recommande vraiment de lire l’article cité ci-dessus (A la poursuite de Bardamu). Ce sont des études de cas tirés de la littérature. Et en particulier de visiter les ressources en ligne en bas de page pour vous inspirer.

De nombreuses sources d’inspiration

Depuis que je l’ai écrit, je me suis mise à utiliser Pexels pour la sélection des images de ce blog. Pexels est une mine inépuisable de noms, les photographes viennent de la Terre entière. C’est aussi une merveilleuse source d’inspiration, tant les images sont variées et riches.

Dans une chronique récente, j’ai parlé de Iouri, le héros de “Les hommes incertains” d’Olivier Rogez, et de la façon dont son nom avait impacté ma lecture. J’ai utilisé pour ça la langue des oiseaux, qui en appelle à notre inconscient.

Attention, votre imaginaire n’est pas celui du lecteur

Olivier Rogez, interrogé sur la manière dont il avait choisi ce nom, a répondu à mes questions.

Bien sûr, ses réponses n’avaient rien à voir avec ce que moi j’avais imaginé. Son imaginaire et le mien ne sont pas semblables, nous ne menons pas la même vie, ne fréquentons pas les mêmes références.

Aussi, ne perdez jamais de vue que quel que soit le nom que vous choisirez, ce que vous y mettrez de sens ne sera peut être perceptible que par vous.

En revanche, la sonorité, la façon de prononcer ce nom jouera un grand rôle dans la perception du personnage par le lecteur.

Prononcez ce nom à haute voix pour savoir si “ça colle”.

Pour progresser encore en écriture et échanger avec d’autres écrivains, rejoignez le groupe Facebook des passionnés, L’Atelier de fiction . C’est un atelier d’écriture créative en ligne où sont publiés et commentés de nouveaux exercices chaque semaine. A tout de suite de l’autre côté.

🗝️ Clé n°4 [+fiche personnage] : Du point A au point B

Le roman c’est l’art de raconter une histoire en animant des personnages qui partent d’un point A et se rendent à un point B.

Le point A c’est qui ils sont avant que l’élément déclencheur se manifeste dans leur vie. Le point B, c’est la version d’eux-mêmes après qu’ils aient vécu des aventures, des mésaventures et des drames, affrontés des contretemps, des aléas, des ennemis ou des péripéties, qu’ils aient ou pas résolu des énigmes.

Qu’ils aient fait, a minima, des rencontres et des choix.

C’est la succession de choix faits par vos personnages qui va alimenter votre intrigue.

Choisir, c’est renoncer

Vos personnages, pour intéresser le lecteur, doivent vivre en tension. Cette tension doit s’accentuer au fur et à mesure que votre histoire se déroule. Si votre personnage est bien construit, le lecteur comprendra qu’il se passe quelque chose de l’ordre de la transformation et s’attachera encore plus au personnage.

C’est pour cela que vous devez aussi savoir ce qui a amené votre héros au point A, c’est-à-dire, son passé. Ce qui a fait de lui ou d’elle ce que il ou elle est aujourd’hui.

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Pour le dire encore autrement, son parcours.

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🗝️ Clé n°5 [+fiche personnage] : Personnages secondaires, une fonction, mais pas que

Sur son chemin, votre héros peut être accompagné par un ami, poursuivi par un ennemi, arrêté dans sa course par un inconnu, se remémorer des relations passées… les possibilités ne manquent pas. Il rencontre des gens. Ces gens sont vos personnages secondaires.

Les personnages secondaires ont principalement une fonction, ils font avancer votre schmilblick d’une façon ou d’une autre. Mais, s’ils apparaissent plus de quelques lignes, ne les réduisez pas à leur fonction.

Faites aussi une fiche pour chaque personnage secondaire et donnez-lui, autant que possible, un point A et un point B.

Cas particulier : L’ami qui raconte

Enfin, dernier point, si votre héro a un ami, un faire-valoir, ce peut être lui qui tient le crachoir, à la manière du Dr Watson qui écrit les aventures de Sherlock Holmes.

Si vous optez pour cette solution, faites bien attention de conserver une distance. Même un ami très cher qui vous connaît bien ne sait pas tout de vous et peut parfois se poser des questions quant à votre façon d’agir. Il n’est pas dans votre tête.

Si vous avez suivi toutes ces étapes, votre galerie de personnages est maintenant d’une grande précision.

🗝️ Clé n°6 [+fiche personnage] : Que dire et que garder pour vous ?

Ne dites pas tout ce que vous savez

J’insiste. Une fiche personnage va vous permettre de donner de la densité, de la profondeur à votre personnage. Mais attention, ce sont ses actes et ses paroles qui témoigneront de son intériorité et ce sont les zones d’ombre que vous ménagerez qui entretiendront le questionnement, le suspense, qui permettront aux surprises d’arriver et qui tiendront le lecteur en haleine.

Ce sont ces zones d’ombres qui vont donner de la profondeur à votre récit.Le lecteur doit pouvoir se demander “que va-t-il faire maintenant ?” ou “pourquoi fait-il cela?”.

Ne dites pas tout non plus sur son physique. Prenez n’importe quel roman, n’importe quel conte ou n’importe quelle pièce de théâtre digne de ce nom et recherchez les caractéristiques physiques du personnage semées par l’auteur.

Vous n’en trouverez pas tant que ça.

Même si pour les besoins de l’histoire vous l’avez fait très grand, très petit ou très gros, ne dites pas la pointure de ses chaussures, sa taille en centimètres ou son poids en kilogrammes. Préférez montrer au lecteur comment il vit cette caractéristique, quel impact elle a sur sa vie.

C’est le lecteur qui remplit les blancs

La raison de ça ? Je vous l’ai déjà dit. Le lecteur doit pouvoir s’identifier au personnage pour avoir envie de le suivre.

C’est ce que le lecteur perçoit de lui-même dans votre personnage qui résonne en lui.

C’est donc le lecteur qui remplira les blancs et qui imaginera tout ce que vous ne dites pas, comme il lui plaira.

Le cerveau fonctionne par association, par analogie et nous avons tous en tête une banque de d’images toutes prêtes à servir. Donnez au lecteur seulement quelques traits, pour l’ambiance.

Faisons une expérience rapide. Si je vous dis : une barbiche noire et une longue redingote ? Vous les voyez ? Un sac à main au bout d’un bras qui se balance et une chanson fredonnée ? Vous avez déjà vu ça ? Des sourcils broussailleux et une voix grave ? Ca vous fait penser à quelqu’un ?

Des images mentales précises ne se forment-elles pas ? Je parie que si. Voyez que vous n’avez pas besoin de beaucoup.

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🗝️ Clé n°7 [+fiche personnage] : Ni 100% sympathique, ni 100% antipathique, ni parfait

Chaque humain est complexe et possède le germe du bien et du mal, de l’avarice et de la générosité, de la bienveillance et de la méchanceté. Personne n’est entièrement sympathique ou entièrement antipathique.

On vous dira parfois qu’un “ bon méchant” doit être très très méchant et faire très très peur. Ce n’est pas vrai. Si vous faites ça vous obtiendrez une caricature. Le « bon méchant » doit être… très dangereux.

Les meilleurs méchants de fiction sont ceux qui sont méchants, certes, mais parce qu’ils ont en eux une faille, une fragilité, quelque chose qui vous les rend attachants malgré vous, ou du moins, qui vous permet de vous mettre un petit peu à leur place.

Le méchant lui aussi a été un enfant innocent. Ne perdez jamais ça de vue.

Attention aussi à ne pas présenter un personnage trop parfait.

Un personnage parfait n’est pas sympathique. Il est agaçant. On l’attend au tournant. Il ne nous intéresse que parce que nous savons qu’il porte un masque et que nous allons assister à la “chute”, à la déchéance de cette façade, que nous allons voir ce qu’il y a derrière le masque.

Sinon, si rien ne se produit en ce sens, le lecteur referme le livre et le jette dans les flammes. Il peut. C’est de la daube.

Le plus grand héros est celui qui surmonte son imperfection pour arriver au bout de sa quête, sauver sa peau, défendre ses valeurs ou protéger ceux qu’il aime.

Je vous recommande, si ce n’est pas déjà fait, de voir de toute urgence “Les Chiens de paille” de Sam Peckinpah, avec Dustin Hofmann jouant le rôle d’un mathématicien qui, mis face au mal et ébranlé dans ses convictions, trouve en lui des ressources inexploitées pour triompher de ses ennemis.

Ce film est génial. Inspirez-vous en. Ne le confondez pas avec le roman éponyme de Drieu La Rochelle, rien à voir.

Cas particulier : le décalage

Attention, certaines personnes sont intéressantes par le décalage qu’il y a entre leur physique et leur énergie de base.

Eric-Emmanuel Schmitt prend l’exemple de Catherine Deneuve, dont la beauté est lente, statique, et le débit de voix très vif, ce qui rend sa personnalité mystérieuse. Il y a un feu qui couve sous la glace.

Ce décalage n’est pas si facile à rendre dans un roman, ne le tentez que si ça sert votre histoire. Et pensez à Catherine Deneuve en écrivant.

🗝️ Clé n°8 [+fiche personnage] : Le sexe et l’argent

Tout être humain fonctionne donc en lien avec son environnement, ses proches et la société qui l’a vu naître. Les deux moteurs les plus puissants de la société sont le sexe et l’argent. On cite aussi le pouvoir, mais le pouvoir s’obtient en général par le sexe ou par l’argent.

Le sexe ou l’argent peuvent amener un personnage à changer d’objectif ou au contraire le contraindre à agir d’une certaine façon, même s’il sait que ce n’est pas une bonne idée.

Il pourra agir contre ses propres intérêts pour assouvir sa quête de l’un ou de l’autre. Ne négligez pas cet aspect. Soyez au clair avec ça dès le début.

Sachez quelles sont les valeurs qui ont été transmises par la famille, et comment le sexe et l’argent jouent un rôle là-dedans.

Est-il satisfait de ce qu’il possède, dans un domaine comme dans l’autre ? Est-il soumis à la tentation ? Est-il jaloux ? Est-il fidèle ? Est-il honnête ? L’a-t-il toujours été ?

Autant de questions à vous poser pour définir un contour psychologique solide.

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🗝️ Clé n°9 [+fiche personnage] : La motivation universelle

Quoi que fasse votre héros, quel que soit ce qu’il affronte, ne perdez jamais de vue que le but premier de tout être vivant est de rester en vie et au-delà de ça, de préserver son intégrité physique.

Si votre histoire prévoit que votre héros se sacrifie, qu’il ait un moteur puissant ou pas d’autre possibilité. Par exemple il peut sacrifier sa propre vie pour la sécurité de ses enfants, qui sont la continuation de lui-même. Mais il doit être sûr que lesdits enfants seront vraiment tirés d’affaire car en se sacrifiant il renonce à être près d’eux pour les protéger.

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Attention, tout revirement de sa part n’arrivera pas comme un cheveu sur la soupe. Il se trouvera en germe dans les pages précédentes. Le germe peut être dans la première page alors que le revirement finit par se produire page 300. Au contraire, ne placez pas le germe page 299, ce serait de très mauvais goût, votre lecteur vous prendrait pour un baltringue qui s’est laissé surprendre par son héros parce qu’il n’était pas assez bien préparé (qu’il n’avait pas rempli la fiche personnage, par exemple).

Je crois que je vous ai presque tout dit. En tout cas, tout ce que je voulais vous dire aujourd’hui. A ce stade, il ne vous reste plus qu’à remplir la fiche personnage et à vous mettre à écrire.

Pourquoi remplir une fiche personnage, me direz-vous ? A quoi ça sert si j’ai déjà mon personnage en tête et que je connais tout de lui ?

A quoi sert une fiche personnage ?

Premièrement : vous faire gagner du temps

Voyez-vous, j’ai commencé à écrire mon roman Toute la lumière sans passer par l’étape « fiche personnage ». Je me croyais plus maline que les autres. Mais j’ai arrêté d’écrire, puis j’y suis revenue, puis j’ai arrêté de nouveau. Je n’étais pas très organisée. Je me croyais maline, je vous dis.

A chaque fois que j’y revenais, il y avait toujours un moment où je me posais des questions. Surtout au sujet de mes personnages secondaires.

Si j’avais commencé par faire une fiche personnage pour chaque personnage secondaire, j’aurais été plus vite. Je n’aurais pas perdu tout ce temps à rechercher ce que j’avais bien pu dire à leur sujet, je l’aurais eu sous les yeux en deux secondes.

Concernant les personnages secondaires, il peut aussi arriver en cours d’écriture qu’ils se révèlent beaucoup plus importants que vous ne le pensiez au début, qu’ils prennent plus de place que prévu dans votre histoire. Si cela arrive, vous vous féliciterez d’avoir rempli une fiche, croyez-moi.

Deuxièmement : mettre en branle votre imaginaire

La seconde fonction d’une fiche personnage extrêmement précise, c’est de pousser votre imaginaire dans ses retranchements, de faire jouer les associations d’idées, de mettre en branle votre usine à souvenirs.

Les questions posées par la fiche aiguilleront votre esprit vers des directions que vous n’aviez peut être pas prévues.

C’est la magie de l’imaginaire qui est à l’œuvre. La fiche personnage est un support parfait… à condition de l’utiliser.

Des fiches personnage déjà prêtes ?

Lorsque j’ai (enfin!) pris conscience de l’utilité de la fiche personnage, j’ai cherché des modèles sur le Web. Ce que vous êtes peut-être en train de faire actuellement. Et j’en ai trouvé des tas.

Mais dans ce que j’ai trouvé, il n’y avait rien de vraiment satisfaisant, rien qui corresponde aux informations que j’avais besoin de connaître. Rien qui me permette de conférer épaisseur et profondeur à mes personnages, seulement une liste de caractéristiques, pour la plupart physiques et plus ou moins pertinentes.

Or, ce qui donne de la profondeur à un personnage, nous l’avons vu, ce n’est pas la couleur de ses yeux, ce sont ses actions. Pour lui donner vie, comme vous le savez maintenant, j’ai besoin de connaître son passé, ses traumatismes, ses besoins, ses motivations…

J’ai donc décidé de créer mon propre modèle de fiche personnage, en vertu de l’adage qui prétend qu’on n’est jamais si bien servi que par soi-même. Je vous invite bien entendu à adapter cette fiche à vos besoins spécifiques, à rajouter des questions aux 210 que j’ai listées.

Franchement, j’aurais aussi bien pu vous proposer une liste en 500 questions. Mais avec ça, déjà, vous avez du grain à moudre.

En conclusion, utilisez une fiche personnage et laissez votre héros prendre les commandes

Voila, vous savez tout ce qu’il y a à savoir pour construire des personnages forts et émouvants. Amusez-vous en remplissant la fiche personnage.

Ah, non. J’oubliais. Je vous recommande aussi de faire un tour sur le blog très complet de Nicolas afin d’en apprendre plus sur les types psychologiques et ce qui nous pousse à agir les uns et les autres.

Une dernière chose. Plus vous entrerez dans le détail dans la phase préparatoire, plus vos personnages s’animeront d’eux-mêmes ensuite. Plus ils auront d’épaisseur et moins vous aurez de mal à déterminer comment ils agissent.

La contrainte que vous vous serez fixée avant de commencer vous sera d’une grande aide lorsque vous serez perdu, déçu ou peu sûr de vous. Car cela vous arrivera. Chaque écrivain traverse des périodes de doute durant lesquelles il a envie de tout envoyer balader.

Quand ça viendra, ce personnage que vous aurez pris grand soin de préparer à l’action dictera sa propre loi. Vous n’aurez plus qu’à le suivre et voir où il vous conduit.

Ah, si, encore un truc. Décidément, il y a beaucoup à dire. N’oubliez pas de mettre à jour vos fiches personnages au fur et à mesure. En effet, malgré votre très haut degré de préparation, vous verrez que votre personnage changera sensiblement en cours de route. Souvenez-vous, du point A au point B.

Ce que l’on vous dit moins, c’est que vous aussi, vous changerez. Le transfert que vous opérerez dans votre personnage fera de vous une personne un peu différente.

Dans un prochain article, je vous parlerai de l’intrigue et de comment construire une bonne histoire. D’ici là, je vous recommande de remplir un des formulaires présent sur cette page pour accéder, entre autres, à la fiche personnage que j’ai concoctée pour vous.

Pour info, en voici le sommaire :

  1. PAGE 5 : Qui est-il ? Identité, lieu de vie, habitudes, etc.
  2. PAGE 12 : Quel est son passé ?
  3. PAGE 16 : Quelles relations entretient-il avec les autres ?
  4. PAGE 21 : Quelle est sa réputation ?
  5. PAGE 23 : Quels sont ses goûts et préférences ?
  6. PAGE 25 : Comment est sa vie matérielle ?
  7. PAGE 26 : L’amour et le sexe ?
  8. PAGE 28 : Quelles sont ses croyances ?
  9. PAGE 31 : De quoi est-il capable (ses aptitudes) ?
  10. PAGE 36 : Ses désirs et motivations profondes ?
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Ecrivez-moi si vous avez encore des questions ou si vous souhaitez que j’aborde un aspect précis avec (encore) plus de détails.

N’oubliez pas.

Pour progresser encore en écriture et échanger avec d’autres écrivains, rejoignez le groupe Facebook des passionnés, L’Atelier de fiction . C’est un atelier d’écriture créative en ligne où sont publiés et commentés de nouveaux exercices chaque semaine. A tout de suite de l’autre côté.

FAQ

Une fiche personnage, qu’est-ce que c’est ?

C’est l’ensemble des caractéristiques qui définissent un personnage. Les écrivains l’utilisent dans l’étape de préparation à l’écriture. Au-delà de l’aspect physique, des noms et prénoms et du milieu dans lequel il évolue, elle doit présenter son passé, ses aptitudes innées, ses compétences acquises, ses croyances, ses limitations, ses traumatismes, ses aspirations, ses motivations, ses secrets, son réseau relationnel, ses points forts et ses points faibles, ses relations avec le sexe et l’argent…. mais aussi lister ce qui est de l’ordre du conscient et de l’inconscient (car c’est en grande partie l’inconscient qui détermine nos actions).

Pourquoi remplir une fiche personnage ?

La fiche personnage remplit trois fonctions.
1-Tout d’abord mettre en branle l’imaginaire de l’écrivain, susciter des associations d’idées, des souvenirs, par les nombreuses questions posées, et lui permettre d’aller plus loin que son idée première. C’est un support à sa créativité.
2-Ensuite de donner un peu de matière organique au personnage en explorant les principaux aspects de son humanité.
3-Enfin, d’avoir sous la main tout ce qu’il y a à savoir sur ce personnage en cas d’arrêt et de reprise de l’écriture. Pour cette raison, il est aussi très important de la mettre à jour régulièrement.

Où trouver un modèle de fiche personnage complète ?

Le blog ecrire-de-la-fiction.com propose une fiche personnage en 210 questions.

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13 réponses à “Personnage de fiction : 9 clés [+ fiche personnage en 210 questions]”

  1. Aurore Declève dit :

    Bonjour, je débarque, je ne connais rien à cette future nouvelle aventure et expérience qu’est l’écriture d’un livre mais, à vous écouter je suis déjà dingue et ça se bouscule dans ma tête 😉 je recherche le document avec les 210 questions (je ne le vois pas sur mon écran … ai peut-être fait une mauvaise manipulation) car je vais en avoir grandement besoin, rien que pour déjà classer mes idées ! merci d’avance 🙂

    1. Bonjour,

      Remplissez le bandeau bleu, le reste suivra. 🙂 Pour info, je suis beaucoup plus active sur Facebook maintenant que dans ce blog.

      J’anime une communauté d’auteurs, si vous voulez nous rejoindre, vous êtes la bienvenue.

      C’est un groupe privé, il faut répondre à quatre questions à l’entrée (sans réponses, l’entrée est refusée ! Trop de spams et de personnes en marketing de réseau qui viennent pour vendre leur salade). Elle a lieu deux ou trois fois par semaine.
      Nous partageons des exercices, des techniques, des ressources dans le but de nous améliorer.

      Au plaisir de se retrouver de l’autre côté ! 🙂

      Voici le lien : https://www.facebook.com/groups/latelierdefiction

      Bonne journée,

      Vie

  2. Amandine Bertrand dit :

    Merci pour cet article. Il est toujours bon de se rappeler comment construire un personnage qui sonne vrai tout en étant attachant (ou pas d’ailleurs). Étant donné que j’ai tendance à écrire le premier jet d’une traite, je fonctionne un peu différemment : j’écris puis je fais des petites fiches personnages (pas aussi détaillées je dois dire) soit juste avant la première réécriture soit juste à la fin du premier jet. Toujours est-il que c’est un outil utile quand, effectivement, l’écriture n’est pas notre travail à temps plein!

    1. L’essentiel est de trouver la méthode qui fonctionne pour toi. Il n’y a pas de vérité absolue dans le domaine de la créativité. La fiche est un seulement un support qui permet de vérifier régulièrement qu’on tient le cap. Ou pas.

  3. Cet article est une source d’inspiration énorme ! Un grand merci pour le partage de toutes ces informations.

  4. Article riche et très instructif. Merci !
    J’imagine qu’avec 210 points dans la fiche de personnage, on peut aisément construire l’épaisseur dont tu parles. Je vais du coup essayer ta fichepour commencer sans m’emmêler les « pinglots » (haha, j’adopte ce terme que je viens de découvrir et que je trouve très amusant)

  5. Bonjour et merci pour cet article. Quand je termine un livre, j’aime imaginer les personnages, ou l’un d’eux, dans une situation quotidienne. C’est vrai que lorsque le personnage, son histoire, sa personnalité, est bien définie, le livre me marque plus. Puis, c’est comme la mousse au chocolat, à peine fini que je relis le bouquin !

  6. Très intéressant et super complet, écrire un livre me paraît vraiment compliqué lol ! J’ai transmis ton blog à une amie qui souhaite se lancer dans l’écriture d’un livre 😊.

    1. Merci Maëva. L’écriture est un processus long et il faut être motivé et discipliné. Mais ce n’est pas insurmontable.

  7. Je n’avais pas réaliser l’importance de connaitre la psychologie humaine quand on écrit un roman. Bravo et merci pour cette découverte !

    1. C’est la base. Sinon vos personnages sonneront creux.

  8. Très bel article. Complet et bien argumenté. Toute la difficulté je pense est de ne pas tombé dans l’excès, dans la caricature, car « trop » n’est pas forcément mieux. Après je pense qu’avec un outil comme la « fiche de personnage », il est possible de ciseler une personnalité et la faire évoluer. Merci

    1. Tout savoir ne veut pas tout dire. Il ne s’agit pas de faire une caricature, c’est-à-dire de forcer le trait, mais conférer de la cohérence.

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