3 clés pour parvenir à romancer sa propre histoire 🗝️🗝️🗝️
« J’ai besoin d’écrire à partir de ma propre expérience, mais je sais bien que tel quel, ça ne donne pas un roman. Il manque des ingrédients. Et surtout, je ne parviens pas à me détacher des faits pour inventer quelque chose qui soit digne d’intérêt tout en restant fidèle à mon propos. »
Autrement dit : comment transformer ma propre histoire en roman ? C’est une question qui revient souvent.
Le désir de se mettre à écrire se fonde parfois sur la vie même de l’auteur et la nécessité d’en témoigner.
L’histoire qu’il veut raconter parle peut-être d’un temps révolu, d’une expérience hors du commun ou d’un traumatisme qui le hante.
Il ressent l’impérieux besoin de dire quelque chose de lui et du temps qui passe à ceux qui viendront ensuite, faire partager des moments essentiels, régler ses comptes avec la vie…
Mais en effet, entre témoignage et roman, il y a le fossé de la fiction, difficile à franchir lorsqu’on passe et repasse les mêmes images vécues, en boucle, dans sa conscience.
Pour y répondre, j’ai trois clés qui font merveille
Trois mouvements.
- ➡️1 – Vider 🗝️
- ➡️2 – Ouvrir 🗝️
- ➡️3 – S’inspirer 🗝️
Trois exercices, à faire dans cet ordre :
- ➡️ Ecrire comme ça vient sans recherche de style ni d’efficacité tout ce qu’on a vécu et qu’on voudrait mettre dans son roman, sans jamais se relire.
- ➡️ Mettre d’autres visages sur les personnages de l’histoire en se référant aux archétypes.
- ➡️ Se référer aux techniques éprouvées de construction de scénario lors du premier jet, quitte à s’en éloigner lors de la réécriture.
1 – Vider / Tout écrire comme ça vient 🗝️
Il s’agit de déposer la mémoire, de vider la conscience, de laisser les émotions traverser le corps (écrire est une action), bref, de faire de la place.
Vous avez probablement remarqué que la plupart des gens fonctionnent avec des réponses toutes prêtes, des histoires si bien intégrées qu’ils les répètent aux uns et aux autres avec exactement les mêmes mots, dès qu’ils s’agit des décisions qu’ils ont prises au cours de leur vie ou des événements fondateurs.
Si vous leur demandez « pourquoi vous êtes-vous installé ici ? », « comment ça se fait que vous n’avez jamais eu d’enfant ? » ou « est-ce que vous vous souvenez de l’accident ? », ils récitent, même longtemps après, une réponse élaborée par leur inconscient la première fois que la question leur à été posée.
Nous sommes tous bâtis ainsi. Nous construisons notre récit de vie, nous posons des mots sur des pensées, des sensations, des émotions, afin de les partager, sans nous mettre en danger. Avec la difficulté de sortir de ce programme que nous avons nous-mêmes conçu et installé pour tendre à raconter une histoire qui nous dépasse et parle à tous, un roman.
Une bonne façon est donc de ne pas commencer par romancer tout de suite, mais d’abord de tout vider, de tout exposer, de tout laisser remonter, par l’écriture, sans porter de jugement. Il y aura peut-être des moments difficiles, peut-être des larmes, mais à la toute fin, le nettoyage opérera et on s’en sentira mieux.
Dans un deuxième temps seulement, on s’attaquera à savoir ce qu’on veut tirer des faits pour les transformer en fiction.
2 – Ouvrir / Se référer aux archétypes 🗝️
Un archétype est un modèle reconnaissable par tous, qui fonctionne de façon symbolique et appelle chez chacun.e d’entre nous une foule d’images et de préconceptions.
Nota bene : il n’est pas obligatoire de se référer aux archétypes pour écrire un roman, on peut très bien s’en passer, surtout si on n’est pas dans la littérature de genre, le polar ou la fantasy par exemple, dans lesquels les archétypes foisonnent, pour le plus grand plaisir des lecteurs, et des auteurs qui s’amusent à jouer avec et à les détourner.
« Pour quoi faire ?
— Pour renouveler.
— Renouveler quoi ?
— Ben justement, le genre.«
Toutefois, dans le cas de la mise à distance de l’histoire personnelle de l’auteur pour en tirer une fiction, les archétypes seront très utiles ; ils nourriront l’imaginaire, appelleront des associations d’idées, établiront des passerelles vers d’autres histoires.
Au fur et à mesure que votre scénario se construira, vos personnages évolueront en complexité et vous pourrez vous éloigner des archétypes.
Pour en apprendre un peu plus à leur sujet, regardez la vidéo ci-dessous, extraite de mon programme l’Atelier des Personnages :
C’est à ce moment qu’il peut être judicieux de rechercher des visages, des attitudes, appartenant à des inconnus. Les moteurs de recherche d’images regorgent de portraits d’inconnus, faites votre choix. Si vous préférez utiliser les traits d’un comédien ou d’une personne réelle, c’est bien aussi. Une célébrité apportera avec elle tout son potentiel de fiction, ce que vous savez déjà d’elle rejoindra votre inconscient au moment de la création en détails du personnage.
Evitez de sélectionner quelqu’un de votre entourage qui vous ramènerait à votre propre histoire.
Ouvrez toujours.
3 – S’inspirer / Se référer aux techniques de construction de scénario 🗝️
Chaque auteur ambitionne, le plus souvent sans oser se l’avouer, de créer quelque chose d’unique, de laisser sa marque sur la littérature. Loin de moi l’idée de vous dissuader d’essayer. Je m’y emploie de mon côté. 😉
Mais il y a cependant des techniques éprouvées pour construire une histoire, et c’est le moment de vous y référer. Lorsque vous les aurez étudiées en long et en large et essayées à peu près toutes (à cet égard je recommande d’écrire des nouvelles), il sera toujours temps de briser les règles et de proposer votre vision nouvelle et révolutionnaire.
Vous pouvez commander chez n’importe quel libraire les livres d’Yves Lavandier, Robert McKee, John Truby, Mary Ann Phillips et tant d’autres. Si vous en voulez un seul, préférez Lavandier. Mais attention, si vous n’êtes pas sûr.e de vous, ces lectures risquent de vous renvoyer dans les cordes et de vous faire abandonner.
Quoi qu’il en soit, en attendant de recevoir « La Dramaturgie » dans votre boite à lettres ou si vous avez décidé de vous en passer (vous en êtes capable!), faites un exercice plus personnel.
- ➡️ Prenez le temps de lister les films et les romans qui vous ont estourbi par leur virtuosité, par ordre de préférence.
- ➡️ Gardez les trois premiers, si possible dans un genre différents.
- ➡️ Tout d’abord, décomposez-les en enchainements de faits. Essayez d’en discerner la colonne vertébrale. Ce n’est pas si simple que ça en a l’air, ça demande du travail.
- ➡️ Ensuite, posez-vous la question du style. Est-ce que cette scène d’action me ferait autant d’effet si le mouvement de caméra était différent ? Quel est le champ lexical employé par tel auteur dans tel passage mémorable ?
- ➡️ Faites deux colonnes. Colonne 1, ce qui est dit/montré. Colonne 2, comment c’est dit/montré.
- ➡️ Déconstruisez les trois histoires à partir de cette grille de lecture toute simple.
Vous allez vite vous rendre compte qu’il y a des constantes, quelle que soit l’histoire racontée.
Il vous reste à appliquer ces constantes pour écrire votre propre scénario, la trame de ce que vous allez écrire en vous inspirant de faits réels qui font maintenant partie d’un corpus de référence beaucoup plus vaste que votre propre expérience.
Vous écrirez toujours à partir de vous, comment faire autrement. Mais vous ne serez plus aveuglé par votre visage dans le miroir.
Vous n’êtes pas seul.e dans ce cas
Un certain R.J. Ellory, dans son magnifique roman paru chez Sonatine, Seul le silence, fais écho à ce mouvement de la pensée. Son narrateur, devenu écrivain, tente de transformer en fiction les traumatismes de son enfance.
Je ne résiste pas à vous proposer cet extrait. C’est le moment où jamais.
Vous êtes encore perplexe ?
Rassurez-vous, le doute est un fidèle compagnon pour tous les auteurs débutants.
A toute fins utiles, sachez que je peux vous aider grâce à l’accompagnement personnalisé de l’Atelier de Fiction.
Post-scriptum : si vous faites partie des flemmards et que produire tout ce travail préparatoire vous rebute, faites au moins le grand vide en écrivant sans jugement et sans souci du style tout ce que vous avez envie/besoin de mettre dans votre premier jet. Ca ne peut vous faire que faire du bien.